[Test] Citizen Sleeper

Partons à la découverte de l'Oeil, station spatiale protéiforme et en déliquescence, à travers les yeux d'un "dormeur" dans ce test du jeu Citizen Sleeper.

L'histoire d'une station spatiale en déliquescence, de serveurs et de pleurotes.

Capture d'écran d'une phase de dialogue du jeu Citizen Sleeper
Capture d'écran d'une phase de dialogue du jeu Citizen Sleeper

Test réalisé sur la version PC sur steamdeck.
Critique publiée le 09/10/2024

Ecran de navigation du jeu Citizen Sleeper
Ecran de navigation du jeu Citizen Sleeper

Ouvrons les yeux et nous voilà dans la peau d'un "dormeur", un robot sophistiqué dans lequel a été transférée la conscience d'un véritable humain qui dort à l'autre bout de la galaxie. En fuite, notre personnage cherche à échapper à la corporation qui la conçu et qui souhaite le récupérer. Un passé mystérieux, une liberté à retrouver, rien de forcement très original. Cependant, il suffit de quelques minutes pour comprendre que notre histoire importe peu. C'est bien l'Oeil, cette station spatiale protéiforme sur laquelle nous nous trouvons, qui est au cœur de ce récit.

Dialogue dans le jeu Citizen Sleeper
Dialogue dans le jeu Citizen Sleeper

Citizen Sleeper est un jeu de rôle narratif. Le joueur dispose de dés dont la quantité correspond au nombre d'action pouvant être réalisées avant la fin d'un "cycle" (une journée quoi). Les valeurs de chaque dé, quant à elles, modulent le pourcentage de réussite des actions (échec, réussite neutre, réussite exceptionnelle). Au fur et mesure de la progression du joueur et de l’achèvement de "destin", des points d'aptitudes peuvent être obtenus. Ils sont à dépenser dans un tableau de compétences, principalement pour améliorer la valeur des dés en fonction des types d'actions. Le système général de Citizen Sleeper est finalement assez simple et passé un petit temps d'adaptation, la progression est fluide et naturelle. On dépense des dés pour faire progresser une jauge de réalisation et ainsi débloquer la suite d'une histoire. Et on recommence.

Capture d'écrant de l'arbre de compétences de Citizen Sleeper
Capture d'écrant de l'arbre de compétences de Citizen Sleeper

En effet, l'essence de Citizen Sleeper réside dans sa myriade de personnages. Tout au long du récit, ils nous raconteront l'histoire de la station, les menaces extérieurs, les problèmes sous-jacent tout en développant une relation avec notre personnage. Certains nous proposeront de donner un coup de main en cuisine d'autres nous demanderons d'offrir à leur conscience un nouveau réceptacle. Ces personnages sont ainsi extrêmement variés dans leurs caractères, leurs motivations et vécus (et leur genres, c'est agréable). De magnifiques illustrations viennent les représenter, et on aurait aimé, d'ailleurs, qu'elles prennent plus de place à l'écran. Les dialogues ne s'éternisent pas et nous donnent toujours envie d'en savoir plus. Citizen Sleeper est très addictif sur ce point.

Jeu : 4/5

Tranquillité : 3,5/5

Citizen Sleeper est sorti le 5 mai 2022 et est maintenant disponible sur toutes les consoles de cette génération. Il est développé par Jump Over The Age, un studio indépendant composé d'une seule personne Gareth Damian Martin. Ancien journaliste de jeux vidéo, c'est lui qui est à l'origine de ce riche univers de SF qu'on découvre dans Citizen Sleeper. Le talentueux Guillaume Singelin s'est chargé du magnifique character design.

Couverture du jeu Citizen Sleeper
Couverture du jeu Citizen Sleeper

Citizen Sleeper offre la liberté aux joueurs de choisir l'ordre de ses actions et quel destin, sorte de quête liée à un personnage, il souhaite poursuivre en priorité. Le titre est pourtant assez linéaire. On peut choisir l'ordre des réponses et des questions que l'on pose mais l'on ne peut qu’influer à la marge sur la suite des dialogues. Certains évènements nécessitent cependant des choix plus affirmés et le jeu propose plusieurs fins. Pour autant, Citizen Sleeper nous permet d'avancer largement dans chaque histoire sans nous imposer de devoir recommencer le titre pour explorer de nouvelles possibilités. A la condition de ne pas s’engouffrer trop tôt dans une fin qui raccourcirait forcément notre aventure.

Alors est-ce qu'on est tranquille en jouant à Citizen Sleeper ? Et bien, oui. Malgré une petite appréhension au début du jeu devant la présence d'un compte à rebours, Citizen Sleeper nous offre le temps d'explorer tranquillement tous les arcs narratifs. En montant en compétence, les actions deviennent plus rapides, quitte à perdre sa cohérence temporelle d'ailleurs, et l'on comprend que l'on peut avancer patiemment. Il n'y a pas de frustration de ce côté. En outre, le jeu nous donne rapidement des gages de la bienveillance des personnages. A part quelques malotrus, les interactions sont agréables, positives et l'on tisse avec douceurs de belles relations. Cependant, la multiplicité des personnages peut nous faire perdre le fil des histoires individuelles, d'autant que leurs illustrations évoluent. Il vaut mieux ne pas trop tarder à terminer le jeu une fois commencé au risque de les oublier. D'autant plus qu'il n'y a pas de trombinoscope pour nous aider à nous y retrouver. Il reste qu'il faut accepter de se plonger dans cet univers complexe, assembler les pièces du puzzle et admettre qu'on ne peut pas tout comprendre. Ce n'est pas de tout repos non plus, même si le jeu prend soin de ne pas nous surcharger.

Citizen Sleeper propose un récit fin et émouvant dont la traduction française sortie début 2024 fait pleinement honneur. La sobriété de la mise en scène du titre et de ses mécaniques nous pousse à faire fonctionner pleinement notre imagination. Les descriptions sont succinctes mais impactantes et, en quelques phrases, on se représente aisément la complexité du monde qui nous entoure. Des corporations capitalistes tombées sous le coup de révoltes, des réfugiés s'entassant à l'autre bout de la station, des organisations mafieuses en conflit, un écosystème naturel à découvrir, un réseau de communication dans lequel rode un programme destructeur, etc. Cet univers est riche, très riche. Il est pourtant rendu digeste par le parti pris de ne le transmettre que par le biais de conversations. Pas de logs, de lectures poussives, d'enregistrements audio annexes. Tout est contenu dans les dialogues. Le jeu arrive ainsi à savamment doser la diffusion d'informations complexes et d'expérience de vie. On a ainsi affaire à un environnement qui nous dépasse largement mais toujours du point de vue de personnages crédibles. Dès la première rencontre, on comprend que nous ne sommes que de passages dans le destin complexe des habitants de l'Oeil.

L'histoire de Citizen Sleeper est remarquable. En faisant le bilan de ces huit heures passées sur le titre, on se prend à regretter ces personnages et les relations profondes qu'on a pu nouer ensemble. Difficile de se prononcer sur les éléments de science-fiction tant on n'y connaît pas grand chose mais on peut jurer qu'il y a beaucoup d'originalité dans ce titre. La trame principale s'est d'ailleurs vue étoffée d'une mise à jour qui la prolonge. C'est tout à fait bienvenue tant le récit semble complet ainsi. On notera la sobriété de la mise en scène du titre. La modélisation de la station est sommaire, propice à l'imagination. Les bruitages nous immergent doucement. Il reste à évoquer la musique d'Amos Roddy qui est simplement parfaite. Elle vient s'amplifier au bon moment et nous berce tout au long de ce séjour sur la station. On garde en tête certaines mélodies qu'on réécoutera avec plaisir.
On attend avec impatience Citizen Sleeper 2, annoncé pour 2025, qu'on espére aussi réussi dans sa narration que dans son rythme.

Conclusion du test de Citizen Sleeper :

Test de Citizen Sleeper