[Test] Clair Obscur : Expedition 33

Petit incartade à la tranquillité avec l'inévitable Clair Obscur : Expedition 33. Pas de test exhaustif du jeu mais mes impressions après l'avoir intégralement exploré.

Clair Obscur : Expedition 33 est la surprise de ce printemps. Sorti le 24 avril 2025, il est développé par Sandfall Interactive, jeune studio montpelliérain et publié par Kepler Interactive. Son développement a véritablement commencé en 2020 sous le nom de projet W.

Capture d'écran du jeu Expedition 33
Capture d'écran du jeu Expedition 33

Test réalisé sur la version PC
Critique publiée le 15/06/2025

Capture d'écran du jeu Expedition 33
Capture d'écran du jeu Expedition 33

J'aime les JRPG et pourtant je me perds régulièrement dans leurs histoires, après un début engageant, à cause de pérégrinations éloignées des enjeux, de zones intermédiaires peu intéressantes et de backtracking accompagnés d'énigmes. Des écueils qu'évitent les JRPG revisités comme Persona 5 ou Yakuza Like a Dragon, mais je confesse ne les avoir pas (encore) finis tant les activités parallèles m'ont fait perdre le fil. Je redoute ainsi de me lancer dans Metaphor Refantazio, inquiet de tenir sur la durée. Pourtant BG3 m'a tenu en haleine pendant plus de 120 heures, je suis donc bien capable de me consacrer pleinement à un jeu. Clair Obscur évite parfaitement ce problème, en proposant un rythme excellent pour un JRPG plutôt à l'ancienne (avec overworld, de nombreuses zones distinctes à explorer). Il accompagne parfaitement le joueur en ouvrant progressivement le jeu et en récompensant continuellement la progression. On débloque l'overwold au bout de quelques heures et les moyens de locomotions s'obtiennent petit à petit. L'intérêt de l'exploration est renouvelé continuellement, sans nous noyer dans les possibilités. D'autant plus que les niveaux à explorer sont relativement courts, du diorama pour récupérer une musique à des zones plus larges qui se parcourent en une heure maximum. Les ennemis sont visibles et le gain d'XP conséquent. Le jeu favorise ainsi la qualité des rencontres à la quantité. La progression est plaisante de bout en bout.

Capture d'écran du jeu Expedition 33
Capture d'écran du jeu Expedition 33

Le level design est pourtant classique, des zones explorables sans mini-map avec des chemins annexes qui reviennent vers les voies principales. Quelques boss et marchands cachés qui viennent récompenser l'exploration. On ne se perd jamais totalement dans les niveaux et on est satisfaisait d'en avoir fait le tour sans y avoir consacré des heures. Les zones qui font avancer le scénario sont localisés sur la mini-map de l'overworld. Pas d'hésitation ou d'énigme à résoudre, le chemin est tracé. Cette approche moderne contraste avec un moment du jeu où l'on doit vaincre trois boss à différents endroit du monde pour progresser. Un rappel de la formule initiale du JRPG, presque en clin d'oeil qui nous permet de réaliser à quel point le jeu s'en affranchit par ailleurs.

J'en viens à évoquer la direction artistique du titre qui est en demi-teinte, sans mauvais jeu de mots. Le design des monstres est à tomber, le jeu s'inspire de partout avec des boss impressionnants à la FromSoftware. Les ennemis sont variés jusqu'à la fin du jeu, sans faire trop de colour swap pour autant. Les environnements sont aussi poussés dans leur diversité. Le jeu propose des zones aux ambiances visuelles très différentes et même sous-marine. Clair Obscur s'appuie pleinement sur l'UE5 pour offrir des graphismes avancés, aux effets de reflet, de lumière et de texture poussés. Mais c'est bien ce photo réalisme qui me questionne. Sans spoiler, le jeu passe à côté de choix créatifs que le scénario permettaient. Le jeu se déroule à la Belle Époque, dans une période qui a vu exploser les différents courant artistiques en France, Clair Obscur aurait ainsi pu être tout autre, au moins vers la fin du jeu. Le jeu manque de ce point de vue là de prise de risque et d'originalité, on ne se souviendra pas de son identité visuelle (à part les fleurs, ok.).

Tranquillité : 2/5

Clair Obscur, pour la faire courte, est devenu en quelques jours un véritable phénomène critique et populaire. Pourtant attendu de pied ferme par celles et ceux qui ont pu y mettre les mains dessus en test, le jeu a surpris par ses ambitions pour le premier projet de la petite équipe de Sandfall Intercative, un peu de chauvinisme en passant. Tout a été dit jusqu'à l'absurde concernant la création du jeu. De leçons de développement aux origines du financement du titre, le jeu a suscité beaucoup de réactions d'aucuns voyant la preuve que tout est possible quand on forme une petite équipe indépendante de passionnés de JRPG, d'autres louant l'absence apparente de propos politiques ou inclusifs du titre. A boire et à jeter. Difficile donc de passer à côté du jeu, tant il était présent médiatiquement. D'emblée intrigué par sa mise en scène, son scénario, et d'avance conquis par ses mécaniques de JRPG, je m'y suis plongé avec envie et je n'ai pas été déçu. Clair Obscur n'est pas tout à fait le genre de jeux dont je parle ici, ce n'est clairement pas un jeu cozy mais ce serait bête de se priver d'en parler tant il y a dire et qu'il m'a plu.

Affiche d'Expedition 33
Affiche d'Expedition 33

Jeu : 4,5/5

Capture d'écran du jeu Expedition 33
Capture d'écran du jeu Expedition 33
Capture d'écran du jeu Expedition 33
Capture d'écran du jeu Expedition 33

Ce classicisme se retrouve aussi dans sa mise en scène. Le jeu pousse les curseurs, avec certaines cinématiques en format 4:3, noir et blanc mais l'ensemble reste assez convenu. D'autant plus que le jeu est très mélodramatique. Cet esthétisme sérieux fait un peu trop artsy frenchy. C'est plutôt du côté des effets sonores qu'on y trouve notre compte. L'audio arrive davantage à nous faire ressentir des émotions fortes que ses effets de mise en scène, on pense à la canne de Renoir par exemple. Clair Obscur est aussi traversé par une OST exceptionnelle tant pour sa durée, avec des variations incessantes, que pour sa qualité. Des morceaux chantés en français, en anglais et même dans une langue inventée. Les chansons font aussi parti de la narration, avec des indices sur l'histoire quitte à en spoiler certains twist. C'est indubitablement le point fort du jeu

Il y a beaucoup à dire sur le scénario de Clair Obscur. Il est très dramatique, cherche à nous faire pleurer dès la première demi-heure, et il y réussit. L'univers est cohérent et convaincant. Clair Obscur ne s’empêtre pas dans des quantités d'éléments annexes pour consolider son lore et l'expliquer. Il est solide sur ses appuis et fait confiance aux cinématiques et dialogues qui ponctuent la progression. Pour autant, il n'évite pas l'écueil de récits à révélations, qui nécessitent de revoir complètement notre compréhension du monde. D'un côté, le jeu est très avare en explication pendant presque les deux tiers du jeu. Au point d'en devenir absurde tant les personnages ne se questionnent pas et n'interrogent pas un nouveau protagoniste clef de compréhension. On sent que le jeu ménage ses effets et fait très attention à ne pas vendre la mèche. De l'autre côté, la révélation entraîne des difficultés à appréhender le récit dans sa nouvelle complexité. Même si Clair Obscur nous donne suffisamment d'informations pour ne pas nous perdre, il manque un peu de matière pour être satisfaisant. Ces choix rendent, de fait, les interactions entre les personnages un peu étranges voire peu convaincantes. Pourtant, le jeu pousse les liens d'amitiés avec un système de niveau de relation. Les liens sont explicites mais on ne peut s'empêcher d'être frustré de l'absence de véritables conversations, assez évidentes, compte tenu des avancés de l'histoire et des retournements de situations. Ce système est ainsi moins organique que dans un Persona. Pourtant Clair Obscur arrive bien à nous tirer des larmes et nous engager dans le sort de ses personnages. Il compte juste un peu trop sur notre capacité à accepter ce mystère et nous dire que si les personnages n'en parlent pas c'est que c'est compliqué pour eux. On reste sur notre faim, d'autant plus que le choix final aurait mérité un peu plus de matière pour mieux en apprécier les conséquences. Le jeu ne nous accompagne pas vraiment dans cette réflexion, qui atteint son paroxysme à la fin du jeu, en nous en laissant pourtant l'arbitrage. Cette frustration témoigne bien de mon implication dans ce récit. L'histoire de Clair Obscur est bouleversante et j'en garderai indubitablement le souvenir. Les personnages ont beaucoup de personnalité grâce à un doublage et une motion capture de grande qualité. Les "putain de merde" avec l'accent anglais me manqueront. Si le jeu évoque des sujets forts, la mort, le deuil et l'amour d'une belle manière, je me questionne cependant sur son traitement du handicap notamment à la fin. J'ai lu des témoignages de personnes handi qui s'y retrouvent mais il y a quelque chose qui m'interpelle. Je ne développerai pas ici pour ne pas risquer de spoiler.

Capture d'écran du jeu Expedition 33
Capture d'écran du jeu Expedition 33

Conclusion du test de Clair Obscur : Expedition 33

Test de Clair Obscur : Expedition 33

Dim dam talé lam vacarme !

Il me reste à évoquer mon rapport au système de jeu en lui-même. Clair Obscur offre des mécaniques de jeu riches et gratifiantes. Chaque personnage a sa propre manière d'être joué et peut-être build de différentes façons. Le jeu propose aussi différentes couches de personnalisation, les armes, les compétences actives, les attributs gagné à chaque niveau, trois compétences passives équipées et les compétences passivées attribuées par utilisation de point de "lumina". Cette complexité peut faire peur, pourtant le jeu est clair et je ne me suis jamais senti débordé. Dans d'autres jeux, j'aurai mis de côté certaines de ces mécaniques découragé d'en venir à bout. C'est peut-être le nombre d'armes qui a pu m'embêter. Mais Clair Obscur trouve sa force dans la possibilité d'ajouter infiniment des compétences passives, en échange de point de lumina. Ces compétences passives ont toutes des effets qui donnent envie, qui peuvent être extrêmement puissantes et qui s'accumulent pour rendre les personnages surpuissants. C'est très addictif tant et on a souvent l'impression d'arriver à casser le jeu. Le jeu ne nécessite que très peu de farm pour arriver à faire des builds puissant, sans pour autant mettre de côté le challenge. Clair Obscur ne vient jamais contrecarrer le joueur de manière drastique et permet de modifier les buils à l'envie. Même si certaines affinités élémentaires peuvent rendre les dégâts impossibles, les autres personnages pourront s'en occuper. C'est finalement le dernier boss optionnel qui nécessite de vraiment se pencher sur la composition de l'équipe et surtout de savoir esquiver. Car Clair Obscur propose un système de parade qui donne beaucoup d'intensité au tour par tour. Arriver à esquiver et même à contre attaquer est extrêmement satisfaisant. D'autant plus que les pattern d'attaque sont lisibles, les fenêtres d'actions assez évidentes grâce à un accompagnement sonore et visuel qui ne sort pas de la diégèse. Si on peut parcourir l'intégralité du jeu sans avoir forcément besoin d'utiliser cette mécanique, au prix de vraiment soigner ses builds, le boss optionnel le plus puissant du jeu le nécessitera. En parlant de combat boss, Clair Obscur en propose énormément dont certains sont mémorables. Le jeu offre ainsi un challenge important mais reste accessible. On est loin d'un DarkSoul même si le jeu en a la silhouette. J'ai d'ailleurs beaucoup apprécier la possibilité de se confronter au contenu optionnel de fin de jeu avant le dénouement. J'ai ainsi pu arriver à l'ultime confrontation en ayant des personnages absolument surpuissants et finir le combat en un coup. Bon, ça casse forcément un peu le climax dramatique de l'histoire mais ça m'a plu.

Capture d'écran du jeu Expedition 33
Capture d'écran du jeu Expedition 33

Conclusion : Clair Obscur : Expedition 33 m'a tenu en haleine de bout en bout, grâce à ses dimensions accessibles pour un JRPG plutôt à l'ancienne et son scénario captivant. L'histoire peut se finir en une trentaine d'heures mais j'y ai passé 70 en prenant le temps de tout explorer. Le rythme du jeu est excellent et ses mécaniques très addictives. Sa musique est bouleversante. Bien que je regrette que Clair Obscur n'ai pas davantage de personnalité esthétique et que je m'interroge sur certains choix de narration, Clair Obscur : Expedition 33 sera certainement mon jeu préféré de l'année ! Merci mon ami et merci à toute l'équipe de Sandfall !